• Pour construire un diagramme, on peut commencer par chercher une
fonction , si
possible la plus simple, qui respecte des propriétés semblant
logiques (on utilise de façon générale ).
Puisque les repérages de Lemaître généralisés montrent
que
n'apporte rien d'utile, on peut de même se limiter à . Si de
tels repérages ne peuvent pas représenter de façon comobile les
particules atteignant l'infini avec une vitesse non nulle, ils
peuvent tout de même les représenter.
Puisque les particules ne peuvent pas avoir d'extremum ,
on peut se limiter à .
◊ remarque : les notations et
tiennent compte du fait qu'on n'a pas encore précisé la façon
dont est relié à
ces limites.
• On peut à ce niveau proposer simplement
avec .
Pour ceci
correspond à :
;
(avec les notations de Novikov), donc la variable est
simplement égale à l'extremum ; correspond
à
;
correspond à .
Puisque le repérage de Lemaître généralisé utilise
avec et constants,
il semble logique de retrouver ici avec et variables.
• On obtient ainsi :
;
.
Ceci permet une représentation paramétrique des courbes .
On y constate qu'il semble exister une zone non représentée ()
dans la région
; cette zone semblerait faire la jonction entre les
“moitiés”
des régions
et
du diagramme de Novikov.
Ceci n'est toutefois qu'une illusion : cette zone décrirait des
particules qui partent de la singularité centrale, montent jusqu'à
un
puis retombent jusqu'à la singularité en faisant demi-tour sans
s'arrêter puisque dans cette zone par
rapport au repérage de Schwarzschild.
Cette zone est non physique pour la description de l'espace vide :
la matière (en expansion puis en contraction) créant le
trou-blanc/trou-noir (dynamiquement) doit forcément avoir un
sommet de trajectoire au delà, donc la région correspondante ne peut
être décrite que par les équations intérieures.
• Les courbes
peuvent comme précédemment être tracées par des méthodes numériques.
On obtient ainsi respectivement les graphiques ci-après pour les
régions
puis .
📖 exercice n° I.
1.2. Prolongement de Novikov
• La comparaison avec le diagramme de Kruskal-Szekeres (publié trois
ans avant les travaux de Novikov) incite à y constater une
ressemblance notable.
Cela est alors d'autant plus intéressant que Kruskal et Szekeres ont
obtenu leur diagramme par une combinaison mathématique dépourvue de
justification physique : les différentes parties semblent bien se
raccorder, mais on doit se demander quelle en est la signification.
En obtenant un diagramme comparable, par une méthode basée sur un
raisonnement physique, Novikov semble avoir résolu ce problème.
La comparaison incite alors à considérer qu'il faut compléter le
diagramme précédent, avec une seconde partie symétrique, ce qui
semblerait devoir être mieux en (et
non ).
◊ remarque : une telle démarche a l'inconvénient de retomber dans la
même ornière, puisqu'il s'agit de combinaisons mathématiques dont on
ignore s'il existe une justification physique.
• On peut commencer par décaler le diagramme, en
utilisant
(au lieu de ).
Ceci revient à utiliser
avec .
On obtient ainsi un équivalent de la moitié droite du diagramme de
Novikov.
On peut alors symétriser en accolant une moitié gauche
avec ,
correspondant à
et
; ainsi au total :
.
• Un tel diagramme devient qualitativement équivalent à ceux de
Kruskal-Szekeres et de Novikov, mais avec l'inconvénient que les
courbes
(et les trajectoire de même) ont une rupture de pente au passage
de .
Pour éviter cela, il suffit d'utiliser une paramétrisation
quadratique avec au lieu
de
; c'est le choix de Novikov :
.
◊ remarque : certains physiciens contestent le bien fondé, par
l'intermédiaire des coordonnées isotropes, du raccordement d'une
zone
avec
et d'une zone
avec aussi
, pourtant d'une continuité mathématique irréprochable ; or il
se trouve que le “bricolage” analogue du raccordement de Novikov,
pourtant moins rigoureux, est approuvé par tous sans conteste.
2. Comparaison des repérages
2.1. Représentation de Schwarzschild
• On a montré précédemment que les trajectoires en chute libre
verticale peuvent être représentées avec les notations de Schwarzschild.
Ainsi pour une particule chutant depuis l'infini, avec une vitesse
“initiale” (limite) nulle, puis atteignant à
l'instant , on
obtient (avec comme
unité et en omettant la composante imaginaire pour ) :
.
Il est souvent dit que cette représentation est incomplète car elle
ne décrit pas l'intégralité des trajectoires : c'est faux. Certes,
on n'obtient le tracé qu'en acceptant qu'il présente une divergence
pour (et
que
ne soit pas bijectif), mais les courbes sont tout de même
représentables en entier.
• Un tel repérage est invariant par changement de l'origine du
temps. Il donne une description pour laquelle des particules peuvent
tout aussi bien sortir que rentrer ; selon les circonstances,
l'astre central peut ainsi autant être “trou blanc” que “trou noir”,
permanent, avec les difficultés que cela implique lors des
croisements de particules montantes et descendantes.
2.2. Représentations de Lemaître
• La famille des courbes précédentes, dont le décalage temporel est
paramétré par la variable de Lemaître,
permet à ce dernier de proposer son repérage comobile. La variable
temporelle associée
décrit l'évolution du temps propre des particules de
référence.
Un tel paramétrage est possible parce qu'il recouvre une fois et une
seule l'ensemble du demi-plan par des courbes
disjointes. Ainsi, la représentation de Lemaître est rigoureusement
équivalente à celle de Schwarzschild.
◊ remarque : par contre, les représentations de Lemaître
généralisées avec ne
sont strictement complètes que pour (il
n'y a pas de particules de référence au delà ; seule l'utilisation
de notations complexes peut y permettre une représentation, en fait
peu pratique).
• Ces repérages sont également invariants par changement de
l'origine du temps. Avec ces notations, selon qu'on donne une
représentation de l'espace-temps tel qu'il est vu par des particules
de référence montantes ou descendantes, il apparaît que des
particules peuvent tout aussi bien sortir que rentrer. Selon les
circonstances, l'astre central peut ainsi autant être “trou blanc”
que “trou noir”, permanent, avec les difficultés que cela implique
lors des croisements de particules montantes et descendantes.
2.3. Représentations de Novikov et Kruskal-Szekeres
• Novikov utilise une famille des courbes différentes : les
trajectoires montant jusqu'à
, à ,
puis redescendant. L'extremum est
paramétré par la variable de Novikov,
qui obtient ainsi un autre repérage comobile. La variable
temporelle associée
décrit l'évolution du temps propre des particules de référence
(différent de celui de Lemaître, puisque les mouvements ne sont pas
les mêmes).
◊ remarque : seule la partie de la
représentation de Schwarzschild est montrée ci-après ; les courbes
ont une partie
symétrique.
• Un tel paramétrage est possible parce que, à condition d'inclure
tous les
, soit
, il recouvre une fois et une seule l'ensemble du
demi-plan par des courbes
disjointes. Ainsi, la représentation basique de Novikov est d'un
certain point de vue rigoureusement équivalente à celle de
Schwarzschild.
Mais l'invariance par changement d'origine du temps est ainsi brisée
: on impose l'instant où la matière créant ce champ en son voisinage
atteint son extension maximum, dépassant forcément . Cela est
associé dans ce type de diagrammes (celui de Kruskal-Szekeres de
même) à une durée (intervalle pour
Novikov) pendant laquelle la singularité n'existe pas.
• Ce paramétrage évite la divergence de la coordonnée pour la
descente et la montée des particules lors du passage en (et
cela quelles que soient leurs conditions initiales).
◊ remarque : on peut aussi essayer de proposer un repérage
avec
mais il faut alors choisir une convention différente pour paramétrer
les courbes, puisqu'elles n'ont plus d'extremum ; il faut dans ce
cas veiller à ce que le recouvrement de l'espace-temps soit complet
et unique.
3. Problème des intersections contradictoires
3.1. Interprétation modulo
• Avec le repérage de Novikov, il est utile d'étudier la trajectoire
limite pour (qui
ne fait pas partie du diagramme de base). En notations de
Schwarzschild, elle se limite au segment
pour . Il
faut ne pas y inclure l'asymptote
(vu la symétrie) pour
; cette droite limite indique seulement que y est
indéterminé car
.
◊ remarque : la situation est analogue en coordonnées polaires dans
un espace plat : pour ,
l'angle est
indéterminé puisque
.
• En particulier, la trajectoire est la même à la montée et à la
descente, parcourue en sens contraires. Pour prolonger par
continuité et ajouter cette courbe à la famille utilisée, il faut
inclure seulement la montée, ou la descente, de façon analogue à ce
qui est fait pour les représentations de Lemaître.
• Dans le diagramme de Novikov, cela correspond aux deux moitiés du
segment
pour (ce
serait aussi
dans le diagramme “basique”).
Si ces deux parties représentent les mêmes points de l'espace-temps,
selon qu'il est vu par les particules entrantes ou sortantes, alors
on peut considérer que les trajectoires qui atteignent cette limite
par la droite de la région
continuent leur mouvement vers la droite de la région
,
c'est à dire que les diagrammes de Novikov et de Kruskal-Szekeres
devraient être interprétés “modulo
” : il n'y
aurait pas de côté gauche.
◊ remarque : c'est une situation analogue à ce qu'on obtiendrait en
coordonnées polaires dans un espace plat, si on prolongeait la
variable radiale dans les
valeurs négatives ; c'est possible, mais à condition de limiter la
variable angulaire à ; il serait sinon
inadéquat de s'imaginer qu'on a ainsi permis l'accès à une autre
région de l'espace.
• Il faut alors se souvenir qu'en étudiant la vitesse d'entraînement
du repérage de Kruskal-Szekeres par rapport à celui de
Schwarzschild, on s'était étonné qu'au passage de l'axe cette
vitesse change brutalement de signe (avec une asymptote à l'infini).
On s'était alors rassuré en vérifiant que cet effet n'existe pas
pour la vitesse d'entraînement du repérage de Kruskal-Szekeres par
rapport à celui de Lemaître. On avait alors simplement soupçonné que
la cause en soit l'invalidité du repérage de Schwarzschild dans
cette région.
Mais à la lumière des propriétés précédentes, cela viendrait
seulement du fait qu'on change alors de particules de référence : en
passant de celles qui descendent à celles qui montent, cela change
naturellement le sens de la vitesse d'entraînement (et la
représentation de Schwarzschild ne serait pas moins valide).
• Pour confirmer cette interprétation, on peut tracer la trajectoire
d'un photon passant cette limite en représentation de Schwarzschild.
Ceux des photons entrants pour lesquels
y changent effectivement de particules de référence (donc de sens
d'écoulement de pour
Novikov).
La relation
donne pour les photons entrants :
;
.
On peut alors tracer la même trajectoire en représentation de
Kruskal-Szekeres (plus facile que pour Novikov).
On y constate que ces photons semblent terminer leur parcours avec
une évolution du temps (ici
) en sens
inverse (comme déjà observé pour les notations de Lemaître) ; c'est
simplement parce qu'on a paramétré le temps d'après l'évolution des
particules de référence et qu'ici on a changé ces références
(descente) pour d'autres évoluant en sens contraire (montée).
• On y constate en outre que, symétriquement, les photons sortant de
la région
vers la région proviennent
pour certains de la région
: le trou noir n'en est pas un.
Qui plus est : on retrouve que si deux particules se croisent dans
la région
, elles ont forcément un second croisement pour
et que ces deux croisements sont vécus en ordre inverse par les deux
particules.
• On constate enfin que l'orientation des cônes de lumière dans les
régions
et
semble ne pas correspondre à ce qui est généralement supposé ; cette
orientation paraît d'ailleurs plutôt difficile à interpréter.
Cela n'est pas particulier aux représentations de Kruskal-Szekeres
et de Novikov : on conclut de même en notations de Schwarzschild ou
Lemaître. C'est plutôt lié à l'invariance temporelle de
l'interprétation.
• L'intervalle de temps entre les deux courbes en
représentation de Novikov (ou de Kruskal-Szekeres) conduit à penser
que le diagramme décrit un trou noir “dynamique” : trou blanc dans
le passé et trou noir dans le futur.
Cela est associé à une brisure de l'invariance de l'origine du temps
: alors imposée à l'instant où la matière créant le champ est à son
extension maximum, forcément en .
• On peut à ce sujet revenir sur l'exemple des photons émis depuis
la région
; certains sortent vers la région et
d'autres, incapables d'aller dans le sens entrant, semblent devoir
sortir vers la région
.
On peut utiliser ici la représentation de Kruskal-Szekeres,
nettement plus facile à tracer que celle de Novikov.
Ces derniers coupent effectivement les courbes
pour des valeurs tendant vers : ils
sortent par rapport au repérage en expansion, mais “le moins vite
possible”.
Ils ne peuvent toutefois pas atteindre la région
car ils sont rattrapés (avant même d'atteindre
) par la
matière qui crée le champ, alors en expansion forcément plus rapide.
Pour causer un trou-blanc/trou-noir, cette matière au voisinage
de doit être
très dense et ne peut pas être traversée par les photons.
Dans ce cas encore, on aboutit à la conclusion qu'il n'y a pas de
côté obscur ; si le diagramme doit être complété pour
(ou
)
c'est forcément avec une métrique décrivant le cas intérieur.
• Cela résout tous les problèmes d'intersections contradictoires et
de sens anormal d'écoulement du temps. On pourrait donc conclure que
les trous-noirs “permanents” sont impossibles, mais qu'ils peuvent
exister de façon dynamique, brisant l'invariance temporelle.
Toutefois les repérages de Lemaître font partie de la méthode
générale de Novikov, or ils respectent l'invariance temporelle... la
conclusion reste donc incertaine.
• Étant donné que le prolongement déduit des coordonnées isotropes
supprime certaines difficultés mais en fait apparaître d'autres, il
semble finalement clair que, si les trous noirs existent, il faut
peut-être chercher ailleurs leur description et leur interprétation.
Les modèles de prolongement pour
semblant seulement modestement crédibles (le prolongement est
mathématiquement possible, mais physiquement non totalement
convaincant), on peut aussi se demander si l'interprétation la plus
raisonnable ne serait pas celle de L. S. Abrams, pour laquelle
l'horizon correspond
au rayon “périphérique” minimum pour une particule ponctuelle.
4. Anomalie fondamentale de la singularité centrale
• Avec le repérage de Schwarzschild, on a constaté une
caractéristique étrange de la singularité centrale ;
pour ce
point semble immobile au delà de l'horizon, ce qui fait qu'il ne
peut pas être doté de propriétés physiques (tout “point matériel”
devant y avoir une vitesse supraluminique).
Or, après effondrement d'un astre en trou noir, toute la matière est
supposée s'y être annihilée et c'est cette singularité qui serait
seule source du champ gravitationnel environnant.
Cette anomalie fondamentale est en outre confirmée avec le repérage
de Lemaître et ses généralisations. Cela est aussi constaté avec le
repérage de Kruskal-Szekeres, mais ce dernier n'apporte pas
d'arguments aussi nets (il est simplement moins adapté pour cela).
• Il est donc important de reprendre le raisonnement avec le
repérage de Novikov, analogue de celui de celui de Kruskal-Szekeres
et de plus comobile.
Conformément à la métrique
donc la vitesse est :
.
Pour la singularité, “fixe” en , on
peut écrire :
donc
.
Mais par ailleurs :
avec
et
. Or pour on
obtient
donc pour tout pour lequel
la singularité existe cela donne une valeur finie de , donc de
même pour .
Ainsi pour on
obtient
et .
Ceci est totalement incompatible avec l'affirmation que cette
singularité mathématique puisse être une singularité physique.