Tex ; un mode d'édition qui était “déjà” moderne en 1980


Commentaire...

Vers la fin des années 70, un peu avant l'invention des micro-ordinateurs, on utilisait d'énormes machines informatiques (au prix inabordable pour un particulier) auxquelles on se connectait au moyen d'un terminal du genre “télétype” électro-mécanique, ou encore moins pratique : un lecteur de cartes perforées.

À cette époque, il n'existait pas de logiciel de traitement de texte, au sens où on se l'imagine de nos jours ; les logiciels qui remplissaient cette fonction étaient d'horribles “usines à gaz”. Pour un scientifique, écrire un texte incluant des formules mathématiques était un casse tête abominable. Lorsque j'ai rédigé ma thèse de physique, j'ai utilisé avec enthousiasme un logiciel qui était en train d'être mis au point : une version prototype de ce qui allait devenir Tex. À l'époque, ce n'était pas du tout "WYSIWYG", mais l'avantage était énorme : on pouvait insérer des formules mathématiques, sans être obligé de laisser des espaces et de demander à une secrétaire de jongler avec une machine à écrire pour rajouter les formules après impression (et encore fallait-il disposer d'une machine à écrire à boule, pour pouvoir changer les polices de caractères).

Puis, au fur et à mesure des années 80, les logiciels de traitement de texte se sont développés, en WYSIWYG, avec dans Word un éditeur d'équations... tout semblait devenir simple et pratique. J'en avais même presque oublié l'existence du Tex quand, il y a quelques temps (en 2015), des collègues m'ont dit que je devrais me mettre au Tex, logiciel “plus moderne” que Word. Après quelques instants de stupeur, je me suis dit que dans l'intervalle Tex avait dû nettement s'améliorer et que je devrais y jeter un coup d'œil attentif, ce que j'ai fait.

Il est vrai que les versions récentes de Tex sont assez performantes ; elle sont même d'un certain point de vue WYSIWYG, dans la mesure où on peut voir le texte généré dans une page en vis à vis du code. Toutefois, quand les partisans du WYSIWYG parlent de cette façon de travailler, ils désignent plus précisément ce qui devrait être abrégé par WYWIWYG : what you write is what you get. Hors de question de mettre les mains dans le code, sauf dans les cas très compliqués où le logiciel n'est pas assez performant (ce qui devrait normalement ne presque jamais se produire). C'est ce que fait (hélas approximativement) Sea-Monkey pour le code HTML ; c'est ce que fait Lyx pour le code Tex.

Dans ces conditions, quel intérêt d'utiliser un codage Tex plutôt que le codage “propriétaire” de Word ? À part le fait que les logiciels Tex sont gratuits, on peut effectivement dire que les fichiers .pdf générés par Tex sont plus légers (pour un même texte, ils sont mieux optimisés pour les formules) et qu'on peut toujours repasser par un éditeur WYSIWYG (et non WYWIWYG) dans les cas un peu trop complexes pour le logiciel... mais c'est à peu près tout. Il existe d'ailleurs des revues scientifiques qui refusent le format Tex et exigent le format Word.

C'est pourquoi j'utilise très peu Tex... Toutefois, par solidarité envers les collègues qui l'utilisent, je suis volontiers disposé à faire de même dans mes correspondances avec eux.