Mécanique quantique mésoscopique
• La thermodynamique “classique” peut être
décomposée en trois niveaux : macroscopique,
mésoscopique et microscopique [1]. Imaginons un instant que,
ignorant totalement l'existence même du niveau microscopique,
Boltzmann ait découvert à moitié empiriquement les
lois statistiques du niveau mésoscopique, ainsi que des
méthodes
pour les exploiter dans les calculs. Aurait on dû croire que la
distribution maxwellienne était incontournable ? Aurait on pu
imaginer l'existence d'un niveau sous-jacent (microscopique) où
la notion même de température peut ne pas exister
(systèmes non maxwelliens).
D'une certaine façon, il semble assez probable que ce soit plus
ou moins le genre de situation
qui se produit pour la mécanique quantique. Lorsqu'on se
rapproche du niveau quantique (mésoscopique), on tend à y
prolonger les schémas assimilés à l'échelle
macroscopique, en particulier l'existence de la notion “classique”
d'espace-temps (l'espace-temps “habillé”, qu'on peut par
analogie nommer “vide maxwellien”). On prolonge ensuite à
d'hypothétiques interactions élémentaires
“nues” intervenant dans un espace-temps conservant un grand nombre de
ces aspects, sans envisager de remettre en question l'existence
même ce certains d'entre eux.
• Au niveau microscopique, “être en un point de l'espace”
signifie simplement “interagir d'une façon particulière
avec l'environnement” ; il n'y a probablement pas d'espace-temps “entre
les interactions” (pas plus qu'il n'y a d'eau entre les
molécules d'eau) : la notion de métrique, comme celles
envisagées en relativité générale, n'a de
sens qu'au niveau macroscopique ou mésoscopique.
En ce sens, je suis en désaccord avec l'argument utilisé
par Weinberg [2] à l'encontre du principe de Mach. Il raisonne
sur une éventuelle anisotropie de l'espace causée au
niveau d'un noyau atomique, en considérant qu'elle est
logiquement la moins faible imaginable compte tenu des distances
très faibles intervenant dans ce cas. S'il est vrai que la
formulation encore imprécise de Mach peut laisser penser ainsi,
rien n'y indique la façon dont les différentes masses
alentour participent dans l'inertie. D'une part, dans
l'interprétation relativiste, on sait maintenant qu'il faut
considérer les énergies au lieu des masses ; d'autre
part, du point de vue de l'instantanéité relativiste, il
apparait que toutes les énergies de l'Univers peuvent autant
contribuer quelle que soit leur distance puisqu'à ce niveau du
raisonnement la notion de distance n'existe pas encore (or celles qui
sont éloignées sont beaucoup plus nombreuses). Ceci ne
revient pas à considérer qu'il existe un
référentiel privilégié pour décrire
l'espace, dans la mesure où on considère qu'à ce
niveau de raisonnement il
n'y a pas
d'espace-temps au sens “métrique” (celui-ci n'étant qu'un
outil pratique pour
décrire “statistiquement” certains effets de l'ensemble les
interactions).
• D'un autre point de vue, ce type d'interprétation conduit
à considérer le boson de Higgs (associé à
la brisure spontanée de symétrie dans les théories
de jauge renormalisées [3]) comme un “phonon” du réseau
des
diagrammes de Feynmann associés ; mais n'est est il pas de
même du graviton ?
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Références :
1. voir par exemple :
“les affres d'un passage à la
limite”, L. Desvillettes et F. Golse, La Recherche, n° 346, octobre
2001 ;
“le comportement des gaz : d'une limite
à l'autre”, L. Saint-Raymond, Pour la
Science, n° 324, octobre 2004.
2. “Gravitation and Cosmology”, S. Weinberg, éd. Wiley, §
1.3 et 3.7, 1972.
3. ceci peut éventuellement être décrit par
l'interaction avec le boson de Higgs ; voir par exemple (le
phénomène est cité dans de
nombreux articles) : “Qui attrapera le Higgs”, La Recherche n° 364,
mai 2003.
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